Analyse d’une peinture – Madame la Marquise de Pompadour

Le musée du Louvre propose des ateliers découverte des œuvres avec des thématiques spécifiques : amour, portrait ou encore le travail spécifique des peintres/sculpteurs… En 2017, le musée a proposé une série de conférences/ateliers sur le portrait. J’avais en tête d’éveiller mon regard à d’autres arts comme la peinture et la sculpture car je sentais que cela pouvait m’aider à améliorer ma maîtrise de l’art photographique. Alors j’ai commandé mon billet et j’ai attendu la première date de rendez-vous de ce cycle avec une certaine appréhension tout de même. En effet, je ne suis pas une amatrice d’art éclairée, j’ai une mémoire fâchée avec l’histoire…et j’avais très peur que le discours de l’animateur soit en des termes incompréhensibles…Mais bon, j’ai osé ouvrir timidement la porte de ce grand musée!

Les personnes qui attendaient dans la salle d’attente semblaient tous aguerries et lorsque l’animatrice a demandé les professions…je me suis sentie petite entre les professeurs d’arts, les étudiants d’arts…Mais l’animateur m’a de suite rassurée que la visite serait non pas sur l’histoire de la peinture, même si cela allait être abordé, mais surtout sur la composition, les détails…et les impressions, émotions! Et là, je me suis sentie à mon aise. Pendant l’histoire j’écouterai et après je partagerai mon regard, et mes émotions!

Voici La marquise de Pompadour, l’œuvre en pastel (beaucoup plus sensible à la lumière) par Maurice Quentin de la Tour entre 1748 et 1755.

Alors commençons par un peu d’histoire… Madame de Pompadour est née Jeanne-Antoinette Poisson le 29 Décembre 1721, décédée à Versailles le 15 Avril 1764. Enfant de la bourgeoisie montante, elle est formée à la danse, la musique, le théâtre. De 1745 à 1750, elle devient la favorite du roi Louis XV. Me de Pompadour est une protectrice des arts et des lettres et soutient Diderot, Voltaire. C’est également une femme d’affaires qui permit le réaménagement de la manufacture de porcelaine de Sèvres avec les couleur jaune jonquille, le bleu de Sèvres ou le rose lilas appelé « rose Pompadour ». A partir de 1750, elle devient la conseillère du roi, l’amie et sera la seule à être autorisée à mourir à Versailles, ultime privilège que lui accorde le roi. Il est donc possible d’affirmer que la marquise de Pompadour est une femme de pouvoir au XVIIIème siècle. En peinture, on ne représente pas de la même façon le portrait de l’homme de pouvoir et le portrait de la femme de pouvoir. La seule femme de pouvoir officiellement reconnue es la reine.

Les symboles de l’homme de pouvoir :

  • La cape avec la fleur de lys
  • Le manteau d’hermine pour indiquer que la Bretagne fait partie intégrante de la France.
  • La couronne
  • La robe du sacre avec une traine de 6 mètres de long

 

L’animatrice nous invite ensuite à travailler en cinq étapes :

  1. Regarder l’œuvre et noter ce qu’il vous vient à l’esprit : assise, féminin, savoir, les arts…impression de rentrer dans son intimité
  2. Relever ses impressions : douceur, réflexion, pensive
  3. Décrire l’œuvre dans sa globalité : grand format, femme élégante, lumineuse et distinguée, pas de bijoux, de simples mules (intimité), attitude moins figée, regard vers le côté, robe à la françise en deux parties, fauteuil sans fleur de lys, gestes très délicats
  4. Regarder plan par plan : multitude d’objets : meuble de style Louis XV, porte dessin à gravure, vase ming, page de l’encyclopédie, siège à l’arrière avec une guitare, livres des lumières (Esprit des lois, l’Encyclopédie), rideau présent mais pas rouge, espace fermé avec un tableau encadré
  5. Contenu et analyse : La marquise de pompadour n’est pas très orientée religion. il est donc possible que le tableau ne représente pas une scène biblique.

Devant un portrait, l’animatrice insiste sur le fait de se laisser guider par son ressenti, de l’analyser puis de voir la ‘plastique’ qui a permis de susciter ce ressenti.

La technique du pastel, moins noble (jamais utilisé pour le roi) mais plus rapide ajoute de la douceur au portrait. Il y a un vrai jeu de lumière avec la marquise qui est en teintes claires alors que l’arrière plan ets sombre.

La robe de la marquise est ‘belle’, symbolisant sa beauté et son caractère de séductrice en tant que première favorite du roi. Cela crée une dualité car à coté de cette magnifique robe, la marquise ne porte ni bijoux ni chaussures mais de simples mules. Cela symbolise que la marquise n’est pas issue de la noblesse.

La guitare située à l’arrière précise que la marquise est musicienne; les livres, qu’elle est cultivée et les gravures qu’elle pratique les arts plastiques. Cela permet d’assoir la position de la marquise comme amie du roi, conseillère du roi. Elle est séductrice mais elle a également du savoir.

 

Quelques informations supplémentaires, trouvée sur le site du Louvre notamment:

La composition du pastel s’organise en effet autour d’un grand motif pyramidal, formé par la marquise et sa mise glissant jusqu’au carton à dessin. L’axe médian de celle-ci passe subtilement au centre de l’œil gauche de la portraiturée, poursuivant jusqu’à sa main avant de descendre au niveau de la lisière du talon. Le cheminement du regard est soigneusement ménagé : le tapis, au premier plan, remplit son rôle de trompe-l’œil semblant creuser l’œuvre de papier et offrant au motif pyramidal sa base. Parcourant la robe, le regard s’élève jusqu’à atteindre le visage de la marquise presque rêveur, tourné vers la gauche. Ce mouvement de tête est accompagné par la courbe que forme la tenture de l’arrière-plan, elle-même reprise par la position du bras gauche et les éléments ondulants de la boiserie de style rocaille. L’œuvre présente une harmonie chromatique remarquable où la couleur bleue domine.

Une robe à la française : il s’agit d’une robe à la française, summum de l’élégance féminine au XVIIIe siècle, dont la mode apparaît vers 1750. Le tissu employé pour la robe de la marquise est luxueux. Dernière preuve du raffinement du vêtement : la doublure, une finition très rare à l’époque, visible sous les plis de la jupe et de la robe. Mais presque étonnamment, la marquise apparaît chaussée de mules. Ni coiffure sophistiquée, ni parure de bijoux, pourtant nombreuses dans son inventaire, ne complètent sa toilette. Nulle négligence néanmoins si l’on considère le caractère privé du portrait.

Un portrait politique audacieux : Placés sur la table où elle s’appuie, des ouvrages ont valeur de manifeste. Le premier d’entre eux, Pastor Fido, tragi-comédie de Guarini, renvoie au goût de la marquise pour le théâtre qu’elle aimait à jouer. Les auteurs des livres suivants, philosophes parfois chassés de France, répondent au nom de Voltaire, auteur de La Henriade (1728), ou de Montesquieu, condamné pour son Esprit des lois (1749) mis à l’Index par l’Eglise en 1751. A côté d’un ouvrage dont le titre est en partie effacé, apparaît le tome IV de L’Encyclopédie qui marque la reprise de cette publication interdite en France depuis 1752.

Il fallait de l’audace à Madame de Pompadour pour s’afficher protectrice d’auteurs récusant le principe de la monarchie absolue, alors incarnée par Louis XV dont elle était la favorite. En avant des livres et du globe centré sur l’Europe et la France. Autre évocation faite à la gravure et aux arts graphiques : les quelques feuilles qui s’échappent du carton à dessin placé aux pieds de la marquise et sur lequel se lisent les armoiries des Pompadour. La musique, quant à elle, est évoquée par des partitions ; l’une tenue entre ses mains de musicienne accomplie ; l’autre posée sur le fauteuil de l’arrière-plan, à côté d’une guitare baroque. Musique et arts, belles lettres et politique se trouvent ici réunis autour d’un portrait magistral. Le genre est en mutation au milieu du XVIIIe siècle et le portrait féminin se diversifie. Parmi les nouvelles formules, se développe l’image de la femme d’esprit. En voici un exemple dont la comparaison est flatteuse pour le portrait de la marquise de Pompadour. A la fois tableau d’histoire et portrait de l’intime, plaidoyer politique et incarnation d’une beauté, l’œuvre de Maurice Quentin de la Tour aura su jouer, au fil du pastel, sur l’oscillation des impressions.

 

Alors maintenant, vous regarderez les œuvres d’art autrement…

Alors maintenant, vous regarderez les photographies et le travail des photographes autrement…

Alors maintenant, vous oserez aller au musée même sans connaître les oeuvres, les artistes…juste pour les voir autrement!!

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